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La newsletter de l'autrice et créatrice du compte Préparez vous pour la bagarre

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Par Rose Lamy
1 oct. · 3 mn à lire
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"Eduquez-vous avant d'éduquez les autres" : mépris culturel en milieu militant.

C'est la rentrée de la bagarre des classes et je suis très en forme.

Bonjour à toutes et à tous !

Dans un peu plus d’un mois, nous fêterons les trois ans de Défaire le discours sexiste dans les médias et de ma sortie de l’anonymat. Oui, oui, tout s’est passé le même jour ! Je me suis montrée pour la première fois à ma communauté, sur le plateau de Philippe Vandel, à Europe 1.

Ces anniversaires sont toujours l’occasion d’un petit bilan. Quand je repense à ces dernières années, quand je me demande ce qui a été le plus merveilleux et le plus difficile, je suis étonnée de ce qui me vient à l’esprit.

Par exemple, je suis devenue assez indifférente au harcèlement des masculinistes et des fachos. Les réseaux sociaux nous ont donné la possibilité de les empêcher de nous écrire ou de commenter nos publications, et je ne lis aucune section de commentaires sous les articles où j’apparais. La problématique n’existe plus dans mon quotidien. Est-ce du déni ou une forme de « professionnalisation » ? Impossible à dire, mais ce qui est sûr, c’est que cette charge mentale disparue m’a fait prendre conscience de ce qui pourrait me détruire un jour : la « soft violence » de la bourgeoisie intellectuelle et militante.

La dénoncer est complexe, puisqu’elle s’exerce en partie en creux. C’est toute sa force de nuisance : les règles ne sont jamais verbalisées ou écrites, et il en va de même pour les exclusions. Elle se loge dans un silence, dans l’absence de tout ce qui, logiquement, aurait dû advenir – une interview, un dîner, un plateau télé – mais qui n’est pas. C’est réel sans être matérialisé. Logiquement, quand j’en parle, on me demande si je suis sûre de ce que j’avance, si ce n’est pas qu’une impression. Peut être que j’exagère.

Quand la violence est verbalisée, je me dis que je n’étais pas tout à fait folle. Ces expériences de violences symboliques accompagnées de preuves sont rares, et elles réactivent tout un réseau d’humiliations préalables. Les blessures silencieuses forment un grappe sous la surface, et tout remonte à la première activation. Si elles s’accrochent à la conscience comme ça, c’est parce qu’on ne sait pas où les ranger, entre blagues, critique constructive et arme de destruction massive de l’intégrité physique et morale.

Les exemples s’empilent au fil des années.

« Il ne faudrait pas tomber dans le mauvais goût de raconter ta vie. »

« Merci pour cette idée, mais ce n’est pas la marketplace de Facebook ici. »

« Éduquez-vous avant d’éduquer les autres. »

« Éduquez-vous avant d’éduquer les autres. » C’est sans doute le souvenir de mépris culturel qui me hante le plus.

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